Part 8- La vie a un prix, la mort aussi

[5 avril 4728 – 15:31]
« -Dis donc, ça fait vraiment bizarre.. marmonna Alpha après avoir débranché sa radio.
-Hein, bizarre de quoi ?
-Tout ça, quoi. De découvrir que je ne suis pas un robot mais un cyborg ayant subi un lavage de cerveau, que les seuls vrais robots dans toute cette merde, ce sont les anciens, et une petite fille rousse à longues couettes.
-Oui, je sais, et j'ai l'air vraiment inoffensive comme ça, mais faut pas s'y fier, j'ai dans les... hmmm... Je réfléchis. Ça va me faire 102 ans cette année... Et, disons que en 102 ans on a le temps d'apprendre bien des choses.
-Moui, je m'en doutais vaguement.
-A l'origine, moi, je suis conçue pour aider tout le monde, et mettre au point des stratégies pour venir à bout de mes ennemis. Donc, je te dis que avec ta jambe en moins, ça va pas être pratique pratique de descendre 7 niveaux et en plus, avec des gardes qui nous courent après.
-Tiens, histoire que je ne meure pas idiot, qui t'a fabriquée et pourquoi ?
-Tu dois savoir que depuis 4312, les robots autonomes sont formellement interdits, suite à une tentative d'asservir leurs humains.
-Euh, oui ?
-Mon père -enfin, mon créateur plutôt, était un grand ingénieur, notamment en robotique, et sa petite fille, Annina, âgée de six ans à peine, venait de mourir d'une grave dégénérescence de l'appareil respiratoire. Je crois que vous appelez cela un cancer. Enfin, le nom de sa maladie n'a pas d'importance, ce qui l'est, c'est qu'elle a malheureusement fait partie des 10 personnes qui sont mortes cette année faute d'avoir été soignées à temps, ou faute de moyens – son père, il s'appelait Harris Wilson, a fait lever des fonds de toute la planète et juste le lendemain du jour où il avait enfin rassemblé assez pour payer son opération, elle est morte. Selon lui, les médecins avaient tué sa fille en réclamant d'être payés avant l'opération et non après ; et il en a conçu une telle rancœur qu'il les a définis comme assassins et a décidé de se dédommager de la perte de sa fille en violant une autre des cinq lois fondamentales de l'époque : ne pas tuer, ne pas construire d'intelligence artificielle autonome, ne pas voler, ne pas mentir, ne pas détruire. Il a construit un robot -un tout petit, hein ! Moi. Cela lui a causé encore plus de souffrances, mais même si je n'étais pas capable de lui rendre toute l'affection qu'il me donnait, il m'aimait tout de même comme sa propre fille. Même s'il savait que moi, je n'irais pas à l'école, que moi, je ne grandirais pas, que moi, je ne me marierais pas et que moi, je n'aurais pas d'enfants. Que moi, je n'étais qu'une image de sa fille, et non la vraie. Bref, puisque je n'avais pas le droit d'exister, il a tout de même eu l'intelligence de me cacher. Toujours est-il qu'un jour, la police a eu vent de mon existence. Ils sont venus me chercher pour me détruire. Et quand ils sont arrivés, Harris m'a dit de m'enfuir dans la forêt. Et surtout, de ne pas toucher l'eau. Alors les policiers l'ont tué. Ils l'ont tué. Je ne comprenais pas, je les ai donc définis comme ''ennemis'' et j'ai réussi à créer ceux que vous appelez les ''anciens''. Eux aussi, de la pure robotique, mais infoutus d'en concevoir d'autres, des robots. Ils fabriquaient cependant tout plein de soldats tout neufs et tout prêts à les servir ; alors ils sont devenus ''ennemis'' et je leur ai mis une mise à jour qui contenait un virus -résultat, ils ont arrêté de m'obéir, ont fait n'importe quoi, et ce fut la fin du monde tel que je l'avais connu... 4675, dernière résistance humaine anéantie, donc les hommes se réfugièrent dans les jungles où les ''robots'', enfin les cyborgs plutôt, ne pouvaient pas les suivre.
-Mais, moi aussi je suis un cyborg. Comment je... ?
-Tu verras, sur la grande place, avec ton copain qui dit plein de gros mots.
-C'est comme ça depuis que sa petite amie a disparu au cours d'un raid il y a quelques mois.
-Ah... Alors, elle est encore vivante, et intacte dans les prisons. Ils mettent au minimum un an pour concevoir un cyborg.
-J'en connais un qui va jurer comme un charretier, moi. »

Partie 9